AUTHOR: I.T. DRAGOMIR
THE MEDIEVAL FORTRESS FROM ENISALA. TOOLS, WEAPONS AND JEWELRY
Danubius, VI-VII, Galaţi, 1972-1973, pp. 29-48.
LA FORTERESSE MÉDIÉVALE D’ENISALA — OUTILS, ARMES ET OBJETS DE PARURE
Résumé
Les murailles on ruine de la forteresse médiévale do Yeni-Sale (aussi Enisala, Enişala) ou Heracleea (Heraclia), véritable nid d’aigle juché depuis des siècles sur la colline de calcaire dénommée „Gras”, qui s’avance entre les lacs Razelm et Babadag, non loin de la route TulceaConstanţa, à 2 km sud-est de la commune d’Enisala et à 7 km est de la ville de Babadag, semblent monter la garde aujourd’hui encore sur les paysages florissants de la Dobroudja.
Les premières fouilles ont été pratiquées à Enisala par le chercheur Grigore Avachian en 1939. Les matériaux archéologiques qu’elles ont livrés ont été déposés au siège de l’ancienne préfecture de la région du Bas-Danube, à Galaţi, avant d’être englobés dans les collections du Musée „Cuza-Vodă”, fondé celle même année.
Ces objets consistent en une grande quantité d’outils, d’armes et d’objets de parure en terre cuite, os, verre el métal, aux formes el aux dimensions les plus variées, mais surtout en céramique entaillée polychrome (à l’état fragmentaire), ornée de motifs géométriques, floraux, zoomorphes et anthropomorphes, exécutés au graffite, caractéristique pour les XIIIe—XIVe siècles. Tant sous le rapport documentaire que muséologique, ces objets constituent une des collections médiévales les plus importantes de Roumanie.
Etant donné que toute la documentation des fouilles d’Enisala a disparu pendant la seconde guerre mondiale, le Musée départemental d’Histoire de Galaţi a décidé de reprendre les fouilles, en collaboration avec l’Institut d’Histoire de l’Académie de la Roumanie, dans le but, d’une part, de clarifier la situation des objets découverts antérieurement et, d’autre part, d’élaborer une étude comprenant tout le matériel archéologique fourni par le site.
II convient de souligner tout particulièrement que les fouilles entreprises en 1063—1964 ont mis au jour des éléments archéologiques inédits, à savoir les vestiges d’un habitat du premier âge du fer (Hallstatt), caractéristiques pour la culture de Babadag, ainsi que les fondements d’un second mur d’enceinte, situé sur le versant est-nord-est de la colline, à une distance variant entre 35 et 75 mètres de l’enceinte de la forteresse couronnant l’éperon.
La présente étude s’est proposé do faire connaître aux spécialistes d’abord, mais aussi à toutes les personnes désireuses d’être tenues au courant des nouveautés archéologiques, une partie des résultats acquis par les recherches effectuées dans l’enceinte de la forteresse médiévale d’Enisala, au moyen d’une présentation sommaire de la forteresse même, suivie d’une description plus détaillée des outils, armes et objets de parure que l’on y a récoltés. Pour sommaire que soit cette présentation partielle, elle permet de formuler les conclusions nécessaires quant à la situation économique, sociale, culturelle et artistique de la population de la Dobroudja, aux XIII-e—XIV-e siècles.
Des matériaux archéologiques récoltés, il ressort de manière évidente que la fonction de la forteresse n’était pas économique au premier chef, les outils, armes, objets de parure et objets religieux que l’on y a découverts étant produits pour les nécessités de la garnison. Quant aux trésors, comprenant des monnaies à l’effigie des voïvodes Petru Muşat et Mircea l’Ancien, ils attestent tout aussi clairement que les habitants d’Enisala étaient engagés dans un trafic commercial avec la Moldavie et la Valachie, l’argent thésaurisé représentant probablement des sommes encaissées à titre de redevances ou de taxes douanières.
La mise en valeur scientifique et muséologique de cet important matériel archéologique de facture autochtone, bien que marqué par de puissantes influences byzantines et orientales, constitue une contribution utile à la connaissance de l’histoire médiévale de la Roumanie et plus particulièrement, à l’histoire de la Dobroudja aux XIII-e—XIV-e siècles, se situant dans le cadre général d’activité archéologique et historique, d’une ampleur sans précédent, mise en oeuvre durant les derniers années.